L'analyse du sujet

Analyser le sujet constitue la première étape de votre travail et sans doute la plus cruciale... Elle va en effet déterminer toute la pertinence de votre traitement. C'est pourquoi, il ne faut en aucun cas négliger cette partie et y passer suffisamment de temps (une heure me paraît nécessaire quoi qu'il en soit...).
C'est sans doute l'étape où les conseils méthodologiques sont les plus délicats à donner car il est difficile de poser un cadre fixe... Votre cerveau et les milliards de connexions à la seconde sont vos meilleurs alliés! Même si l'entraînement constitue la meilleure des préparations (pour information, tous les sujets d'écrit 2 du capeps et de l'agrégation depuis 1999 sont ici, de nombreux sujets traités ici et ici), voici quelques pistes...:

1. Repérer le format du sujet
Le sujet peut prendre plusieurs formes:
  • Il peut inclure une question comportant un ou plusieurs termes interrogatifs (c'est la tendance des 10 dernières années si l'on examine les intitulés de sujets...) 
Exemple: "Dans quelle mesure et comment l'enseignant d'EPS peut-il s'appuyer sur les connaissances scientifiques relatives au contrôle moteur pour favoriser l'acquisition des compétences attendues? Illustrez par des exemples pris dans des APSA relevant de deux compétences propres" (capeps externe, 2012).


Quelques "définitions" pour ne pas passer à côté du sujet:
- "dans quelle mesure" situe la question entre l'absolu et le pas du tout... Cela vous invite à exprimer à quel niveau se situe la réponse entre les deux extrêmes... Dans l'exemple ci-dessus, les deux extrêmes sont: "l'enseignant peut parfaitement s'appuyer sur les connaissances"... et "l'enseignant ne peut pas du tout s'appuyer sur les connaissances scientifiques"... Le sujet demande de se positionner entre ces deux extrêmes et donc de préciser les "mesures" dans lesquelles l'assertion est valable ou ne l'est pas. Autrement dit, à chaque fois que le sujet pose la question de "dans quelle mesure", vous devez situer votre point de vue sur un curseur et donc nécessairement envisager les limites (les mesures) à l'assertion proposée par le sujet... Un synonyme pourrait être "à quelles conditions".
- "comment", "comment l'enseignant peut-il..." signifie "de quelle manière", "par quel(s) moyen(s)". Si le sujet pose la question du comment (et c'est souvent le cas), c'est qu'il vous invite explicitement à examiner et à proposer les mises en oeuvre didactiques et pédagogiques. On pourrait donc le remplacer par "quelles mises en oeuvre pédagogiques et didactiques...?"
- "en quoi" (souvent suivi d'un groupe nominal) est une tournure intégrative: elle  interpelle à la fois le lien de causalité et peut renvoyer aux raisons (on peut alors le remplacer par "pour quelles raisons") mais également les moyens (comment), la nature (quoi, qui, quelles dimensions...) ou encore la temporalité (quand).
  • Le sujet peut également inclure une question ne comportant pas de terme interrogatif.
Exemple: "L'enseignement des techniques en EPS doit-il ignorer ou copier celles du sportif ou de l'artiste de haut niveau?" (capeps externe, 2009).
"Les notions "de connaissances et de compétences", "d'évaluation des acquis des élèves", introduites institutionnellement, sont-elles susceptibles de transformer la conception et la mise en oeuvre de l'EPS au sein de chaque EPLE et de chaque leçon?..." (capeps externe, 2011)

Ce format de sujet vous invite à prendre position, à vous situer par rapport à deux pensées contraires. Il invite d'emblée à penser la question du "dans quelle mesure" ou du "à quelles conditions" même s'il ne la pose pas ouvertement. 
  • Le sujet ne pose pas de question. 
Exemple: "Risque et sécurité en EPS" (capeps externe, 2005).

C'est plus rare mais il arrive que le sujet ne pose pas explicitement de questions. Dans ce cas, c'est à vous de trouver les questions porteuses de sens et d'enjeux professionnels. Vous pouvez prendre appui sur les différents termes interrogatifs: "en quoi, comment, dans quelle mesure, à quelles conditions, quelles mises en oeuvre, etc."

2. Repérer "le coeur du sujet"

Bien lire le sujet, plusieurs fois s'il le faut pour essayer d'en avoir une première compréhension d'ensemble...
Ensuite, il convient de repérer ce qu'on peut appeler "le coeur du sujet", autrement dit les termes-clés, incontournables. Ce "coeur du sujet" devra être présent tout au long du devoir. Si une partie ne traite que d'une partie du coeur du sujet, alors elle est hors-sujet: si on enlève une artère au coeur, il ne fonctionne plus... Si vous enlevez une partie du coeur dans votre copie, vous mourez (symboliquement bien sûr!).

Exemple: Comment les pratiques d'évaluation peuvent-elles aider l'enseignant d'EPS à amener chaque élève à un niveau de compétence reconnu?"
Ici, le coeur du sujet est:
Les pratiques d'évaluation ==> niveau de compétence reconnu
Chacune des parties devra donc traiter de l'intégralité de cet aspect (comment les pratiques d'évaluation permettent l'apprentissage et notamment l'acquisition d'un niveau de compétence reconnu). Une partie que ne traiterait que des pratiques d'évaluation et qui présenterait par exemple l'intérêt de l'évaluation diagnostique sera donc HS; au même titre, bien évidemment qu'une partie qui montrerait comment un enseignant peut favoriser l'acquisition des compétences attendues sans parler explicitement d'évaluation...
Une fois le "coeur du sujet" repéré, il ne doit plus vous quitter! L'analyse de chacun des termes du sujet se fera avec en tête ce "coeur du sujet", ce qui vous évitera de trop vous égarer...
Une fois que vous avez votre "coeur" bien accroché dans votre tête, vous pouvez vous lancer dans l'aventure de l'analyse du sujet et de tous les termes qui le composent...!

3. Analyser le sujet - dégager les questions implicites

Pour analyser correctement un sujet, attachez-vous à "définir" tous les termes du sujet, sans en laisser d'emblée de côté parce qu'ils ne vous paraissent pas importants d'un premier abord. Vous avez toujours en tête votre "coeur du sujet" qui vous permet de rester connecté au sujet...
Dans une dissertation, "définir" doit être pris dans sa double acception, il s'agit non seulement de "déterminer avec précision" (acception courante du terme "définir" = "donner la définition de") mais aussi, et surtout, de "délimiter, circonscrire". Cette dernière acception du terme est plus rare dans le langage courant et pourtant, dans une dissertation, c'est surtout de celle-là dont il est question. Définir pour définir (donner une définition littérale d'un mot) a un intérêt limité si cela ne permet pas de mieux cerner le sujet. 
Lorsqu'on analyse un sujet, la définition des termes doit permettre de circonscrire et de délimiter le sujet, c'est-à-dire de mieux cerner le sujet. 
Comment définir ce terme? à quoi peut renvoyer ce terme? Quel(s) problème(s) professionnel(s) se cache derrière ce terme?, etc. sont des exemples de questions que votre analyse doit permettre de soulever.

Cette étape (définir tous les termes) devrait vous permettre de dégager le/les problème(s) professionnel(s) que cachent le sujet (= les questions implicitement posées par le sujet)...
Ensuite, vous vous rendrez compte que certains termes sont secondaires: ce sont les "mots-guides" qui précisent le cadre de réflexion, et non les "mots-clés" qui cachent les problèmes principaux posés par le sujet. Même s'ils ne forment pas le "coeur du sujet", il ne faut pas les oublier pour autant car ils précisent le cadre de réflexion.
Tous les termes doivent être questionnés lors de cette phase. Les mots-clés devront être également définis. Ci-dessous un exemple donné par Raphaël Leca sur son site "culturestaps":



En conclusion, ne laissez pas d'emblée un terme de côté parce qu'il ne vous paraît pas important d'un premier abord... C'est peut-être derrière lui que se cache toute la richesse du sujet! Attardez-vous sur tous les mots et regardez ce qu'ils apportent à la réflexion (questionnez-les! amusez-vous à regarder comment ils peuvent enrichir la réflexion!)... Après cette étape, vous serez peut-être en mesure de vous détachez de certains mots voire de certaines parties du sujet pour proposer un axe de réponse et de traitement.

Petit aparté..: QUESTIONNER OU DEFINIR?
Tous les termes doivent être questionnés sans pour autant être définis...
Exemple: "Dans quelle mesure l'enseignant d'EPS peut-il aider les élèves à apprendre?"
Le verbe "aider" peut être défini = "faciliter", "permettre" = mettre en oeuvre les conditions favorables à l'apprentissage.
Il doit également être questionné = "quelle peut être la nature de l'aide apportée par l'enseignant? Elle peut être forte, modérée, invisible pour l'élève...?" "Dans quel cas il vaut mieux qu'elle soit importante, modérée? Existe-t-il des situations où il vaut mieux qu'elle soit invisible pour l'élève?", etc.
Bien entendu, il ne s'agit pas simplement de poser les questions... Pendant cette phase d'analyse du sujet, il s'agit d'y répondre en regardant si on est capable d'étayer chaque question et d'argumenter... Il faut voir où nous mène la réponse à ces questions en fonction des connaissances que l'on a (Cf vidéo ci-dessous).

3bis. Trier et organiser vos connaissances

En même temps que vous cherchez à cerner le sujet, il faut que vous fouilliez dans vos connaissances pour voir ce qui s'y rattache, ce qui peut permettre d'éclairer les questions soulevées et donc ce qui vous permette de répondre au sujet et à sa complexité.
Il faut trier et organiser vos connaissances pour trouver des éléments de réponses. Attention , vous n'avez pas forcément besoin de déployer une encyclopédie pour répondre au sujet! Quelques arguments et exemples bien choisis peuvent suffire. Une fois le tri opéré, il vous faut formuler votre "réponse au sujet (= votre problématique - cf "l'introduction") et organiser vos connaissances en 2 ou 3 parties distinctes.

Ci-dessous une analyse de sujet, filmée en conditions "réelles" 
(= traitement du sujet en direct, pas de préparation préalable)
N.B.: Ces conditions "réelles" font que le résultat paraît toujours très imparfait pour celui qui le fait... Mais le but est d'identifier les mécanismes de pensées qui opèrent durant cette étape cruciale et de voir comment on arrive à construire une problématique et un plan (dans les délais imposés par l'épreuve et sans paniquer...!).
C'est l'analyse du sujet ainsi que vos connaissances qui vous permettent progressivement de construire votre réponse (problématique et plan):

Sujet: "Dans quelle mesure l'enseignant d'EPS peut-il aider ses élèves à apprendre"

L'analyse du sujet (CF. vidéo) permet d'aboutir à la réponse suivante:
"Nous montrerons que l’enseignant d’EPS peut faire progresser ses élèves et les aider à acquérir les compétences attendues par les programmes s’il effectue des choix et des mises en œuvres didactiques et pédagogiques qui lui permettent de composer avec la diversité des élèves. Néanmoins, nous montrerons également dans le même temps, qu’il est parfois préférable que l’enseignant s’abstienne d’intervenir pour que les élèves puissent apprendre « seuls » (en apparence) en composant avec leurs ressources propres. L’aide de l’enseignant devient alors invisible pour l’élève ce qui lui permet d’apprendre davantage.
Dans une première partie, nous verrons que c’est en proposant des formes de groupement et des aménagements didactiques adaptés aux différences de niveaux moteurs que l’enseignant d’EPS peut optimiser l’apprentissage des élèves. Cependant, nous montrerons que dans des situations d’évaluation par les pairs, il est préférable de ne pas intervenir sur la constitution des groupes pour ne pas inhiber les élèves dans leur processus d’apprentissage.
Dans une deuxième partie, nous montrerons que l’enseignant peut aider l’ensemble de ses élèves à se rapprocher de la compétence attendue, en proposant des régulations adaptées aux ressources mobilisées par chacun des élèves et en individualisant donc les propositions et feed-backs. Mais nous verrons dans le même temps, qu’il est parfois important que l’enseignant se dessaisisse temporairement de sa responsabilité du savoir (qu’il s’abstienne d’aider en « dévoluant » le savoir aux élèves) en proposant des situations a-didactiques afin de rendre optimal le processus d’apprentissage.
Enfin, dans une troisième partie, nous verrons qu’en proposant des contenus diversifiés, appartenant aux deux registres de genre, l’enseignant d’EPS peut aider ses élèves, filles et garçons, à devenir compétents, même si dans certains contextes d’enseignement, notamment en milieu difficile, et dans des situations d’opposition compétitive, il est préférable de laisser les élèves s’organiser pour favoriser davantage d’engagement, notamment de la part des filles."



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